Grenelle des violences conjugales : restitution des groupes de travail

Le Président de la République a consacré Grande Cause du quinquennat l’égalité entre les femmes et les hommes. Pilotée par le Secrétariat d’État chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations et placée sous l’autorité du Premier ministre, la Grande Cause mobilise l’ensemble des ministères. Alors que le nombre de féminicides n’est pas en recul, dans une société encore malade de ses violences conjugales, le Premier ministre a lancé le 3 septembre 2019 le Grenelle des violences conjugales avec 11 ministres et secrétaires d’Etat, en présence de victimes et familles de victimes, des associations, des professionnels et des acteurs de terrain.

Plusieurs mesures ont été annoncées, à cette occasion dont :

– le fléchage dès 2019 d’un million d’euros à destination d’actions territoriales nouvelles du fonds « Catherine » contre les féminicides en plus des fonds déjà engagés,

– la création de 1 000 nouvelles places d’hébergement et de logements temporaires pour les femmes victimes de violences

– la mise en place du bracelet électronique anti rapprochement

– la suspension de l’autorité parentale pour les auteurs de féminicides

– le fait que l’Etat se porte garant des femmes victimes de violences dans leur recherche de logement, via la Garantie VISALE,

– le lancement d’un audit de grande ampleur sur l’accueil des femmes victimes de violences, dans 400 commissariats et brigades de gendarmerie

Ce processus de concertation s’étendra jusqu’au 25 novembre, journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, pour que de nouvelles actions soient déployées pour prévenir et lutter contre les violences conjugales. Et que le pire n’arrive pas alors qu’on peut l’empêcher. Depuis son lancement, le Grenelle des violences conjugales a mobilisé au plan national membres du Gouvernement, experts, citoyens, associations, institutions, administrations 11 groupes de travail spécifiques ont travaillé sur des thèmes majeurs les violences intrafamiliales, l’éducation et la prévention, la santé, le monde du travail, les outre mer le handicap, l’accueil en commissariat et gendarmerie, l’hébergement, la justice, les violences psychologiques et l’emprise, les violences économiques. Plus de 150 événements locaux ont eu lieu sur tout le territoire, organisés par les Préfets députés, directrices régionales et déléguées départementales aux droits des femmes. Tous ont produit des propositions. Leurs travaux et propositions prennent en compte toute la diversité des territoires, en métropole et outre mer. La conclusion des travaux des groupes de travail, restituée publiquement ce 29 octobre, est un point d’étape important.

C’est pour cette raison que Marlène Schiappa Secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, a souhaité faire cette restitution publique afin que toute la société puisse en débattre et s’en emparer. C’est une démarche ambitieuse qui réunit, dans un même refus du statu quo, des élus, des citoyens, des militants, des experts mais aussi des policiers, gendarmes, magistrats, travailleurs sociaux, professionnels de santé, enseignants, responsables de centres d’hébergements…

Cette mobilisation générale vise à une transformation ambitieuse, radicale, historique, notamment des pratiques professionnelles. Tous les groupes de travail ont pointé des problèmes réels certains processus dysfonctionnent clairement. Pourquoi, aujourd’hui encore, certains dépôts de plaintes n’aboutissent t-ils pas ? Pourquoi, aujourd’hui encore, certaines victimes qui ne parviennent pas à se signaler ne sont elles pas détectées ? Pourquoi, aujourd’hui encore, n’y a t il pas davantage d’ordonnances de protection prononcées ? Pourquoi l’entourage des victimes ne sait il pas vers qui se tourner ou les enfants co victimes sont ils parfois oubliés ? Ce ne sont là que quelques exemples.

Chaque groupe s’est employé en partant de l’écoute des victimes et de leurs proches, à décortiquer les faits, détecter les failles et rechercher des solutions. Grâce à un travail participatif et de réflexions collectives, chaque groupe de travail a cherché à cerner les besoins, les carences ou encore les dysfonctionnements dans la chaîne de traitement des réponses aux victimes. Aucun champ n’a échappé à la réflexion globale. Ces groupes de travail, très ouverts, ont exploré le parcours des victimes mais aussi des domaines encore méconnus, comme l’emprise psychologique ou les violences économiques.

Le Gouvernement va désormais examiner ces travaux dans le détail. Les députés s’en inspireront pour porter des mesures législatives dans les prochaines semaines. Ces travaux alimenteront la réflexion interministérielle qui aboutira, le 25 novembre, à l’annonce de nouvelles mesures, plus efficaces, plus protectrices, plus harmonisées aussi, afin que cesse enfin le fléau des violences conjugales.

Restitution des groupes de travail

Justice, piloté par le Ministère de la Justice

• Permettre au médecin et à tout soignant de porter à la connaissance des autorités, sans l’accord de la victime, des faits de violences conjugales en cas de risque sérieux de renouvellement de celles ci (modification de l’article 226 14 du code Pénal

• Décharger les descendants de leur obligation alimentaire envers le parent condamné pour homicide volontaire sur l’autre parent (modification de l’article 207 du code Civil

• Mettre en place des protocoles de repérage et de suivi des sortants de prison.

• Mieux garantir l’information de la victime sur l’état d’avancement des procédures.

• Encadrer les permis de visite de l’auteur à la victime.

• Assurer une plus grande protection des plus vulnérables (adaptation du dispositif Téléphone Grave Danger et sensibilisation des juges des tutelles sur personnes âgées et vulnérables) et l’adapter aux réalités des territoires (DOM TOM, zones rurales).

• Éviter les contacts auteurs / victimes à l’occasion de l’exercice du droit de visite et d’hébergement des enfants.

Handicap, piloté par la Direction générale de la cohésion sociale

• Mettre en accessibilité les numéros 3919 et la plateforme de signalement en ligne des violences

• Mettre en place un centre ressource « vie affective et sexuelle » dans chaque région, pour les personnes en situation de handicap.

• Former massivement les professionnels de l’accompagnement et de la santé au droit à la vie affective et sexuelle et au repérage des violences.

• Inclure systématiquement des indicateurs et des données genrées sur les 4 types de violences, physiques, sexuelles, psychologiques et économiques, dans toutes les enquêtes et questionnaires.

Violences psychologiques et emprise, piloté par Yael Mellul (avocate pénaliste et spécialiste des violences conjugales)

• Définir les violences psychologiques et l’emprise, et préciser leurs éléments constitutifs

• Faire du suicide forcé une circonstance aggravante (modification de l’article 222 33 21 du Code pénal et suivant

• Vulgariser la compréhension des violences psychologiques et de l’emprise (campagnes de communication grand public, réseaux sociaux, clips

• Inclure systématiquement cela à la formation des professionnels, des forces de l’ordre, des professionnels de santé.

• Mettre en place un groupe de travail interministériel et participatif, dans l’esprit du Grenelle, pour une action de court, moyen, long terme de lutte contre les violences psychologiques et l’emprise.

Violences économiques, piloté par Chrysoula Zacharopoulou, députée européenne et gynécologue

• Définir et codifier les violences économiques dans la loi pour faciliter les poursuites.

• Redéfinir la procédure et les critères d’indemnisation des victimes de violences conjugales, en s’inspirant de la procédure de réparation pour les victimes du terrorisme. On parle par exemple en Espagne de terrorisme machiste.

• Sensibiliser le personnel de Pôle Emploi à la détection des violences et généraliser les dispositifs d’accompagnement avec des conseillers formés et dédiés.

• Offrir un lieu unique d’information et d’orientation au niveau local qui rassemble tous les acteurs publics, privés et associatifs.

• Encourager les pratiques bancaires visant à soulager les victimes de violences en asphyxie financière : avance financière d’urgence, aménagement des dettes.

• Faire évoluer les mentalités administratives qui peuvent enfermer les femmes victimes de violence dans leur relation de couple : compte bancaire commun, préférence pour le mariage etc.

Coopération associations hébergement, piloté par la Direction générale de la cohésion sociale

• Flécher les 250 places d’hébergement créées pour les femmes victimes de violences vers la mise en sécurité des femmes en très grave danger

• Déterminer un point de contact dédié aux femmes victimes de violences au sein des Services intégrés de l’accueil et de l’orientation (SIAO).

• Orienter systématiquement la victime par le SIAO vers une structure d’hébergement adapté ou un logement en cas de demande d’hébergement formulée au 3919

• Orienter en priorité les femmes victimes de violences vers une structure d’hébergement généraliste non mixte en cas d’indisponibilité de places spécialisées.

• Développer la non mixité des centres d’hébergement.

Travail, piloté par le Ministère du Travail

• Sensibiliser les employeurs à l’identification des comportements pouvant signaler des difficultés liées à des violences conjugales

• Favoriser la mobilité professionnelle des salariés victimes de violences conjugales.

• Identifier parmi les bonnes pratiques de premier rang le fait d’accorder des autorisations d’absence spéciales ou des aménagements horaires pour permettre aux victimes d’effectuer leurs démarches

• Mettre à disposition des victimes un moyen dématérialisé de conserver leurs bulletins de paie ou autres documents administratifs pour éviter toute rétention du conjoint violent

• Encourager l’affichage du 3919, des coordonnées des associations locales spécialisées dans les lieux de travail et réaliser des actions de sensibilisation et de communication

• Encourager la formation sur les conséquences des violences conjugales sur le travail des personnes exerçant les fonctions de gestion des ressources humaines, les managers et les représentants syndicaux et mettre en place des partenariats pour faciliter la mise en place de formations à destination d’un public pluridisciplinaire

• Rappeler aux partenaires sociaux qu’ils peuvent négocier des dispositions spécifiques à la lutte contre les violences conjugales dans les accords d’entreprise.

Accueil en commissariat brigade de gendarmerie, piloté par le Ministère de l’Intérieur

• Renforcer les formations initiales et continues des forces de l’ordre

• Mettre en place des outils d’évaluation du danger lors de l’intervention, ainsi qu’au commissariat de police et à la brigade de gendarmerie

• Créer, en plus de la grille d’évaluation du danger et de l’audit, un protocole clair d’accueil en gendarmerie et commissariat

• Remettre systématiquement un document d’information simplifié aux victimes sur leurs droits et dispositifs d’accompagnements

• Renforcer l’action partenariale des services de police et gendarmerie, développer le nombre d’intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie et mettre en place des astreintes les soirs et week-end pour les associations de victimes.

Outre mer, piloté par le Ministère des Outre mer

• Rendre le 3919 disponible 24h/24h, adapté aux langues locales et aux personnes en situation de handicap, ou s’appuyer sur des numéros locaux

• Réquisitionner les armes blanches et armes à feu des auteurs de violences dès la plainte.

• Créer une Maison des Femmes pour chaque DROM qui réunisse l’ensemble des acteurs impliqués dans le parcours de prise en charge.

• Renforcer la formation des professionnels de santé avec une prise en compte des facteurs culturels ultramarins

• Réaliser une campagne de prévention globale, multi supports et suivie autour des violences conjugales spécifique à la réalité de chaque territoire d’Outre mer : acteurs publics et privés présents, figures locales, médias locaux, langues locales…

Violences intrafamiliales, piloté par le Secrétariat d’État en charge de la Protection de l’enfance

• Aligner le statut de l’enfant témoin sur le statut de l’enfant victime

• Permettre aux professionnels de santé de signaler une situation de violence au sein du couple concernant une personne majeure, sans risquer un rappel du conseil de l’ordre en modifiant les dispositions législatives applicables en matière de secret professionnel

• Sensibiliser l’ensemble des acteurs et identifier des réponses adaptées à la situation des hommes victimes de violences au sein du couple

• Mettre en oeuvre une formation adaptée des forces de l’ordre pour permettre un accueil bienveillant des victimes et des associations d’aide aux victimes afin de les sensibiliser sur les spécificités dont les personnes LGBT sont victimes

• Demander au JAF à se prononcer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale par le parent auteur des faits en cas d’interdiction d’entrer en contact avec la victime dans le cadre de l’ordonnance de protection

• Permettre au JAF de statuer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale en cas de rejet de l’ordonnance de protection

• Garantir l’évaluation et l’orientation des mineurs exposés aux violences intrafamiliales vers un parcours de soins gradué.

Santé, piloté par la Direction générale de l’offre des soins

• Mettre en place un « brevet contre la violence » dans l’éducation.

• Faciliter la prise en charge des soins psychologiques pour les victimes de violences conjugales.

• Dépister systématiquement les addictions lors de plaintes pour violences pour mieux documenter le lien entre addiction et violences conjugales.

• Mener des études sur les morts maternelles pour évaluer la prise en charge des femmes enceintes victimes de violences et définir des axes d’amélioration pour leur prise en charge.

• Communiquer largement et former les professionnels impliqués dans le repérage et la prise en charge des femmes victimes de violences conjugales.

Éducation Prévention, piloté par le Ministère de l’Education Nationale

• Créer un document unique de signalement des violences et un guide pour mieux protéger les élèves victimes

• Rendre obligatoire une formation sur l’égalité filles/garçons dans la formation initiale des enseignants, des personnels éducatifs et des cadres.

• Créer une plateforme nationale de ressources pour valoriser l’expérimentation et étendre les bonnes pratiques

• Effectuer dans chaque établissement un diagnostic annuel sur l’état des relations filles/garçons réalisé par le référent égalité et les élèves membres des Conseils de vie collégienne et Conseils de Vie Lycéenne.

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