La directive européenne sur le droit d’auteur adoptée

La directive européenne sur le droit d’auteur  à une a été approuvée par 348 votes pour, 274 contre et 36 abstentions par le Parlement européen réuni en session plénière à Strasbourg, mardi 26 mars 2019. Le Conseil de l’UE devra également entériner le texte au cours des prochaines semaines (ce qui ne devrait pas poser de difficultés). Puis les Etats membres auront deux ans pour transposer les dispositions dans leurs droits nationaux. 

Que contient la version finale de la directive ?

Ce texte est indispensable pour la défense de notre modèle culturel. L’irruption du numérique et la hausse massive de la consommation de contenus en ligne qui l’a accompagnée a fragilisé le droit d’auteur, certaines entreprises exploitant gratuitement des contenus créés par d’autres. Face à ces nouveaux défis, le texte adopté représente une réponse ambitieuse et juste. La directive sur le droit d’auteur doit permettre aux titulaires de droits (les créateurs) et aux éditeurs de presse d’obtenir de meilleurs accords de rémunération pour l’utilisation de leurs œuvres et contenus figurant sur les plateformes internet. La loi européenne rend ainsi les plateformes directement responsables des contenus uploadés sur leur site et donne automatiquement le droit aux éditeurs de presse de négocier des accords au nom des journalistes pour tout article utilisé par les agrégateurs de nouvelles.

Le texte comporte 3 avancées fondamentales :

  • La création d’un droit voisin du droit d’auteur pour les éditeurs et agences de presse (art. 11), qui permettra d’assurer une meilleure rémunération lors de la reproduction en ligne de leurs article
  • Une responsabilisation accrue des plateformes en vue d’assurer un meilleur partage de la valeur liée à la diffusion des œuvres en ligne, au bénéfice des créateurs ;
  • La consécration d’un droit à une rémunération juste et proportionnelle des créateurs.

L’utilisation des contenus par les plateformes internet

L’objectif : L’Union entendait s’attaquer à un problème bien connu dans l’industrie de la musique : contrairement à des plateformes de streaming comme Deezer ou Spotify, qui achètent les licences aux ayants-droits afin de diffuser leur musique, une plateforme comme YouTube ne se considère pas responsable du contenu posté par ses utilisateurs. Et ne reverse que des compensations dérisoires aux ayants-droits en comparaison des revenus publicitaires générés par la plateforme.

Ce qui a été adopté : Les plateformes seront désormais responsables des contenus publiés par leurs utilisateurs. Elles auront désormais l’obligation de conclure des accords avec les ayants-droits des œuvres pour qu’ils soient rémunérés lorsqu’elles sont uploadées, ou de retirer les contenus dont la publication ne respecterait pas le droit d’auteur. Au moyen si nécessaire d’outils de filtrage automatique. Les obligations seront néanmoins moins importantes pour les plateformes ayant moins de trois ans d’existence et dont le chiffre d’affaires est inférieur à 10 millions d’euros afin de ne pas les pénaliser par rapport aux géants tels que YouTube. Et des exceptions sont prévues s’agissant de l’utilisation d’extrait d’œuvres à des fins parodiques, de gifs ou de mèmes.

Ce qui faisait débat : Le filtrage automatisé était le point le plus controversé. Pour les défenseurs des libertés numériques les plateformes en viendront nécessairement à censurer certains contenus pour se protéger des infractions au droit d’auteur. Il sera en effet potentiellement difficile pour une machine de distinguer la véritable contrefaçon de ce qui relève de l’exception au droit d’auteur (par exemple, un extrait audio venant illustrer une vidéo de critique musicale). Plus largement, c’est l’utilisation d’un instrument technologique pour appliquer le droit qui a fait débat.

L’utilisation des articles de presse par les plateformes internet

L’objectif : La création d’un droit voisin pour les éditeurs de presse. Le droit voisin, comme le droit d’auteur, apporte certaines protections. La différence est qu’il ne s’applique pas aux créateurs, mais aux personnes et entités qui participent à la création de l’œuvre. Pour la Commission européenne, ce droit permettrait de négocier plus facilement des licences payantes avec les plateformes ou sites internet qui indexent automatiquement leurs articles, comme Google Actualités ou Facebook.

Ce qui a été adopté : la création d’un droit voisin du droit d’auteur pour les éditeurs de presse est entérinée. De cette manière, les médias seront rémunérés lors de la réutilisation de leur production éditoriale par les agrégateurs d’informations tels que Google Actualités ou Facebook. Les revenus générés pourront être partagés entre les éditeurs et les journalistes. Et des exceptions au principe sont prévues s’agissant des reprises d’extraits « très courts » ou de mots individuels. Quant au partage d’hyperliens, il restera libre.

Il ne s’agit en aucun cas de donner aux plateformes le pouvoir de censurer des contenus en ligne. A la veille d’une échéance cruciale pour notre continent, l’adoption de ce texte est le signe d’une Europe unie, d’une Europe qui protège, d’une Europe qui défend son identité et sa diversité culturelle.

Le texte fera l’objet d’une transposition rapide en droit français.

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